Texte de Miguel Piccand, Photo de couverture Christoph Malaval
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Bienne, l’équipe du nouvel entraîneur en Suisse Martin Filander, pointe au 7e rang de National League. C’est quelques rangs plus haut que ce que la majorité des observateurs prédisaient pour les Seelandais en début de saison. Même si Bienne redescend tout gentiment au classement avec 6 défaites concédées sur ses 7 dernières sorties, on a pris le temps d’analyser les forces «rouges et jaunes» en présence.
Car oui, Bienne a depuis le début du nouvel exercice globalement peu de chiffres en sa faveur. L'équipe du Seeland a la moins bonne attaque du championnat avec seulement 2,2 buts inscrits par rencontre, soit 2 rangs derrière… Ajoie, qui est à 2,4. Mais bien sûr, pour être 7e du classement avec une telle statistique offensive, il faut être solide derrière. C’est le cas pour les coéquipiers de Toni Rajala qui n’encaisse que 2,2 buts par partie, soit la meilleure moyenne du pays derrière Zurich (2,0 buts en moyenne).
Il faut dire, que comme chaque saison ou presque (sentiment désagréable de nous répéter), Bienne a dû faire avec beaucoup, beaucoup de blessés. Le capitaine Gaëtan Haas n'a joué que 5 parties, Damien Brunner 6, le pilier de la défense Viktor Lööv 12 et Jere Sallinen 15. La profondeur de l'effectif seelandais étant ce qu'elle est, c'est des jeunes avec peu (pas) d'expérience en National League qui ont dû prendre le relais.
Photo: Andy Buettiker
En situations spéciales en revanche, Bienne est on ne peut plus dans la moyenne de la ligue puisque les hommes de Filander ont le 6e jeu de puissance le plus efficace avec un chiffre de 20,0% d’efficacité (moyenne de la ligue à 21,1%), et le 8e meilleur jeu en désavantage numérique avec une efficacité à 79,2% (la moyenne étant à 78,9%).
En parlant de cas individuels, Toni Rajala est – comme toujours – dans une position très favorable, avec ses 20 points en 26 parties, dont 11 buts inclus. Mais ensuite, c’est plus ou moins le vide, puisqu’il faut descendre à la barre des 13 unités pour retrouver les deux 2e co-meilleurs pointeurs du EHCB, Fabio Hofer (5 buts) et Alexander Yakovenko (1 seul). Hofer est donc le 64e meilleur pointeur de la ligue, alors qu’on pourrait penser qu’un 2e meilleur compteur d’une équipe devrait plutôt être dans le Top 30, voire 40.
En parlant de statistiques avancées, Bienne est là-aussi à la traîne car l'EHCB produit peu d'actions dangereuses à l'offensive. En parlant de «xGF%» (pourcentage de buts escomptés en la faveur de Bienne sur leurs matchs), le chiffre est faible avec un 42,6% (13e fiche de la ligue, devant Ajoie). Les buts escomptés à forces égales par 60 minutes de glace sont de 1,86. Un club comme Ambrì-Piotta est à 2,39 buts dans la même statistique, avec un xGF% de 52,1%. Certes, leur situation démontre que provoquer du danger n'est pas toujours un gage de succès.
Intéressons-nous donc au diagnostic identifié ci-haut. Qu'est-ce qui se passe à 5 contre 5 pour être autant peu percutant en termes de réalisations offensives? Est-ce un problème de «Shot Quality» (qualité de tir) ou plutôt une question de volume de tirs? En ne considérant que le mois de novembre, Bienne a marqué 12 buts à 5 contre 5 contre 27 à Berne (9 parties disputées pour les deux clubs). Le «Corsi For» de Bienne durant ces matchs était de 354, contre 387 à Berne, soit deux chiffres relativement proches (9% de différence). En revanche, en considérant les tirs qui viennent du slot, c'est 114 à 147 pour Berne (29% de différence!). Le graphique ci-dessous illustre justement ces 9 matchs de novembre. Il ne faut pas chercher beaucoup plus loin pour comprendre la différence de productivité entre les deux formations, en tout cas sur cette période. Bien sûr l'échiquier offensif de Bienne actuellement ne peut pas être comparé à celui de Berne, car à peu près tout réussit au club de la capitale. Mais il paraît cependant important pour l'équipe à Filander de prendre en compte ce paramètre pour les semaines à venir: être plus actifs dans l'enclave.
Un autre chiffre met clairement en lumière les problèmes seelandais liés au manque d'activité dans le slot: la distance moyenne d'un but marqué par Bienne cette saison est de 7,7 mètres. C'est très élevé et d'ailleurs le plus haut chiffre de la ligue. Dans le tableau présenté ci-dessous, on peut voir une certaine corrélation entre la distance moyenne des buts inscrits et le nombres de buts marqués par rencontre. Il faut toutefois souligner que certains effectifs talentueux comme Berne ou Lausanne n'ont pas besoin d'être très actifs dans le slot pour marquer des buts. A l'inverse, FR Gottéron et Ajoie ne ménagent pas leurs efforts dans l'enclave avec beaucoup de buts inscrits proches de la cage. Mais leur moyenne respective de buts inscrits reste relativement basse. Si cela permet à Ajoie de marquer plus de buts qu'espérés, il semble clair que FR Gottéron joue de malchance (et de maladresse) depuis un certain temps… La conclusion à ce tableau est qu'être plus actif dans l'enclave aide bien sûr à être plus productif, cependant cela ne compense pas complètement un certain manque qualitatif de l'effectif.
Pour Bienne, il s'agit donc d'améliorer ce point, tout en gardant sa solidité défensive. Martin Filander a encore du pain sur sa planche pour sa première saison dans notre championnat, et heureusement!
Miguel Piccand est un spécialiste travaillant dans le monde du hockey pour divers médias suisses depuis 2016. Il occupe différents rôles: Consultant en direct, Commentateur et Rédacteur.
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