Duel des deux plus gros félins

Texte de Miguel Piccand, Photo de couverture: Valérie Badan / Andrea Branca
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Lausanne connaît enfin l'identité du club qu'il affrontera en quart de finale. C'était soit Ambrì-Piotta, soit Langnau après le 1er tour des play-in. Ce sera finalement un duel de félins puisque Kloten a fait le nécessaire pour envoyer les Tessinois en vacances. En parlant de duel entre lion et tigre, on lit régulièrement que le second nommé aurait l'avantage dans un duel en un contre un, car il est plus grand et plus puissant. Mais ce n'est probablement pas cette réalité que nous verrons sur la glace.

Ou, en tout cas, ce n'est pas ce que nous nous attendons à découvrir. Lausanne a accompli une saison extraordinaire de bout en bout et est attendu tel un animal extrêmement agressif et dominateur sur son territoire et même en dehors. Mais ce serait une erreur de sous-estimer les Emmentalois. Analyse compartiment par compartiment, comme cela a déjà été fait pour les autres séries (Berne-Fribourg ici, et les duels alémaniques par ici). 

Photo: Kevin Pasche
Photo credits: Valérie Badan

Kevin Pasche: Comment va-t-il vivre son premier run de titulaire en play-off ?

Kevin Pasche a été extraordinaire de bout en bout cette saison, dominant la ligue au niveau des blanchissages (9, 2e gardien à 5) et stoppant 92,6% des lancers qui lui étaient adressés sur… 42 matchs. Le duel aurait été très serré si Langnau pouvait aligner Stéphane Charlin (opéré de l’épaule début février et annoncé absent pour 6-8 semaines, sera-t-il rétabli ?), mais ce serait probablement une autre histoire face à Luca Boltshauser (89,6% en moyenne). Au niveau des statistiques avancées mises à disposition par le site de référence NLicedata.com, Pasche aurait dû encaisser 20 buts supplémentaires cette saison (!) (+0.48 xGA/60 minutes de jeu) alors que Boltshauser finit lui avec une statistique négative de -0.23 xGA/60'. Attention, Charlin a constitué un véritable mur cette saison et surpasse largement Pasche dans cette statistique. En effet, au moment de sa blessure, le futur gardien du GE Servette sauvait… 1 but par match (1,02 xGa par 60 minutes en comparaison avec le nombre de buts encaissés) ! Si Charlin n’est pas rétabli à temps, avantage à Pasche malgré le fait qu'il soit très peu expérimenté en séries. Au contraire, s’il est rétabli, ce duel de gardiens pourrait être très serré.

Tableau 1: Statistiques de buts escomptés reçus en comparaison avec les buts encaissés par 60' de glace (NLicedata.com)

Des défenses équilibrées avec des leaders parfois difficiles à identifier

Derrière, deux des meilleures défenses s'affrontent car Lausanne a reçu 128 buts en 52 parties et Langnau... 126! Thierry Paterlini joue-t-il « à la Ehlers » cette saison ? Pas vraiment, car par exemple, Langnau a plus marqué que FR Gottéron (11e statistique des Tigres sur 14). D’ailleurs c’est aussi les deux meilleures équipes en infériorité numérique, avec les SCL Tigers sur le trône à 87,5%. Mais quelles sont les faiblesses de ces deux formations sur le point de vue défensif, alors ? 

En inspectant de plus près les buts encaissés cette saison (Figure 1) à forces égales, on n’en apprend pas beaucoup plus. Tout juste pouvons-nous vérifier que Charlin et sa défense ont été vraiment très bons cette saison puisque la distance moyenne de leurs buts encaissés était de 6,4 mètres (6,9 mètres pour Lausanne). Cette statistique prouve en quelque sorte qu’il fallait plus ou moins une précision de tir et la distance parfaites pour marquer. A Lausanne la défense ne comporte pas vraiment un leader incontesté… Comme chaque saison ou presque, Lukas Frick présente des statistiques défensives vraiment solides. Les deux étrangers – Gavin Bayreuther et David Sklenicka – eux font bonne impression, sans plus. Et si c’était un point faible dans la course au titre… Ou même dans la course aux demi-finales ? 

Figure 1: Buts reçus par les deux formations cette saison (NLicedata.com)

A Langnau, le patron « all-around » défensif est Juuso Riikola. Extrêmement complet, l’ancien défenseur de Pittsburgh (80 matchs de NHL) apporte une plus-value indéniable au jeu collectif emmentalois dans les deux sens de la glace. Son lancer frappé est aussi de très haute qualité sur le jeu de puissance. Vili Saarijärvi, lui, autant décisif qu’il peut l’être sur le jeu de puissance, présente un peu plus de carences défensives. Le duel entre les deux défenses est sans doute plus serré qu’imaginé initialement… Match nul !

Une profondeur suisse qui donne un bon avantage au LHC

Devant en revanche, Lausanne a un avantage incontestable : sa profondeur au niveau des joueurs suisses. Damien Riat a terminé à 37 points, Théo Rochette à 0,82 point par partie malgré une fin de saison difficile (blessures, changements de partenaires de trio), Jason Fuchs à 29 unités, Ken Jäger à 14 buts et Tim Bozon à 26 points. Ces cinq bons éléments suisses, Langnau en détient 3 si nous comptons de façon généreuse : Dario Rohrbach qui accomplit une excellente saison à 32 points, Julian et Flavio Schmutz sont à 23 et 21 coches. On peut aussi noter Dario Allenspach qui a fini la saison de très belle manière (4 buts sur ses 3 dernières parties). Mais il est indéniable que Lausanne a un avantage conséquent. Les étrangers ? Alors qu’Aleksi Saarela a été décevant cette saison malgré ses 18 buts (29 points), Harri Pesonen et Saku Mäenalanen ont aussi eu de la peine à se montrer productifs comme la saison passée avec des fiches respectives de 0,63 point par match et 0,67 sur seulement 27 matchs disputés. Du côté lémanique, les leaders sont clairement Antti Suomela, un des meilleurs joueurs de la ligue (0,85 point par match) et son compère et ami Ahti Oksanen (0,73). Avantage Lausanne. 

Cela se vérifiera-t-il sur la glace ? J’ai tendance à penser que oui. Mais le tigre ne sera pas une bête facile à abattre. La saison des hommes de Paterlini – et les chiffres – le prouvent. 

Pronostic : Lausanne 4  –  2 Langnau

Photo: Thierry Paterlini
Photo credits: Berend Stettler