Signé Stéphane – D’où viennent les rumeurs sur les salaires ?

Dans le hockey suisse, l’opacité des salaires versés aux joueurs laissent place à de nombreuses spéculations plus ou moins hasardeuses. Mais d’où viennent ces « informations privilégiées » qui filtrent dans les médias et sur les réseaux sociaux ? Parfois des agents, mais très souvent des dirigeants de clubs.

Plus les ressources que vous possédez sont rares et valorisées, plus vous gagnerez d’argent. Un principe qui s’applique parfaitement au hockey suisse. Un marché dénué d’accord visant à restreindre la liberté des joueurs ou à limiter la part des revenus versée en salaire à l’instar de la NHL. Au grand désarroi de certains dirigeants.

« On est carrément asphyxié » me confiait récemment un directeur sportif. Mais voilà, la loi suisse interdit toute forme de collusion qui permettrait de contrôler les salaires. Et on est bien loin d’une convention collective de travail qui obligerait les clubs à ouvrir leurs livres et à partager les revenus. Chacun préfère faire sa petite cuisine interne pendant que les fans, eux, s’en contrefichent.

Si les clubs partagent volontiers l’origine de leurs revenus, ils sont nettement moins enclins à partager la façon dont ils dépensent leur pécule. Car dévoiler leur masse salariale revient à se mettre de la pression. On préfère jouer les petits parce que les clubs de cœur ont meilleure presse. Les insuccès s’expliquent et les succès deviennent des exploits qui rassurent le peuple. L’argent n’achète pas tout !

La belle histoire du petit qui bat le grand, du triomphe de la campagne contre la ville. Des événements éphémères qui surviennent lors de belles soirées d’hiver mais qui ne font jamais long feu au printemps. « Tout ce qui cher n’est pas forcément bon, mais tout ce qui est bon est forcément cher ». L’historique des clubs champions est là pour témoigner de la véracité de ce dicton.

Le mystère des salaires

En entretenant le mystère entourant les salaires dans une ligue en plein essor, on pique la curiosité. Ce qui laisse place à de nombreuses spéculations qui, étrangement, semblent aller crescendo depuis l’avènement de ceux qu’on considère comme des nouveaux riches : Genève, Fribourg, Lausanne et dans une moindre mesure, Bienne.

La nouvelle répartition de la puissance financière à travers la ligue semble déranger. Alors on cherche à connaitre les salaires octroyés, plus souvent dans le but de dénoncer que d’informer à mon humble avis. Des renseignements qu’on obtient en prêchant le faux pour savoir le vrai. Ou en jouant à « ni oui, ni non » avec les joueurs, les agents et les dirigeants.

Duel Borgman-Pesonen

Les agents

De manière générale, les scoops sur les salaires ne proviennent pas des vestiaires, car l’Omerta est de mise. Personne ne parle de son salaire, par crainte d’attiser la jalousie et de provoquer un malaise typiquement helvétique. Tout le contraire de la NHL, où les salaires sont publiés.

De leur côté, les agents doivent se faire discrets et agir comme des canards : rester calme et paisible en surface, mais pédaler en-dessous. Et surtout ne pas donner de précisions qui pourraient nuire à leurs joueurs. Sauf qu’il arrive parfois que des informations ciblées peuvent servir les intérêts d’un client lors d’une négociation.

La récente nouvelle selon laquelle le SCB va devoir faire un « gros effort » financier pour conserver Benjamin Baumgartner pourrait entrer dans cette catégorie. Surtout lorsqu’on prend le soin de spécifier que le joueur se plait à Berne et que les concurrents dans le dossier sont Rapperswil et Ambrì. Idem dans le cas de Dominik Egli et ses demandes de salaire qui ont filtré dans les médias à un moment clé des pourparlers, alors qu’il ne resterait que trois équipes en lice.

Il arrive aussi que des agents laissent filtrer subtilement le salaire d’un « gros poulain ». Une façon d’afficher leur efficacité et de montrer que ce sont eux qui obtiennent le plus d’argent pour leurs clients. Ça en jette, surtout auprès des parents. Parce que la compétition entre les agents pour représenter les jeunes talents est féroce. Elle débute même à l’âge de 13 ou 14 ans !

L’annonce d’un contrat d’une valeur de 3 millions pour 5 ans à Lugano pour David Aebischer pourraient être un exemple du genre. Car la nouvelle a surpris plusieurs initiés. D’abord parce qu’elle met inutilement de la pression sur le joueur. Et parce que les informations qui circulent dans les coulisses font état d’un salaire moyen nettement inférieur aux montants avancés. Ce qui ne remet aucunement en cause la valeur du défenseur droitier évidemment.

David Aebischer

Les directeurs sportifs

La façon la plus fréquente de connaitre les salaires est de discuter avec les directeurs sportifs. Pas pour apprendre le salaire de ses joueurs, mais pour en savoir plus sur le salaire accordé par les autres clubs. En effet, lorsqu’ils échouent dans une négociation, que ce soit par frustration ou pour dénoncer la « folie » de la concurrence, les « GM » se lâchent très souvent auprès des journalistes.

Une phrase du genre « ma dernière offre se montait à 500'000 et il a signé ailleurs » laisse présager que le joueur convoité a obtenu plus d’un demi-million. Ou encore « son agent m’a demandé si je voulais surenchérir sur l’offre de 400’000 qu’il a reçu du club X, mais j’ai refusé » nous dévoile le salaire approximatif du joueur en question. Les exemples en la matière sont nombreux.

Il s’agit aussi d’une technique efficace pour justifier son immobilisme ou, encore mieux, sa grande sagesse sur le marché des transferts. C’est d’ailleurs le moyen utilisé par Martin Steinegger pour expliquer l’exode massif de ses joueurs suisses. On apprend incidemment que les éléments qui quitteront le HC Bienne ont reçu des offres entre 400'000 et 450'000. Bien trop cher pour son club.

Signé Stéphane – D’où viennent les rumeurs sur les salaires ?

Même si des voix discordantes avancent que les offres de Bienne étaient concurrentielles financièrement sur certains dossiers, on voudrait montrer que le club de la Tissot Arena ne fait pas partie des « riches ». Qu’il appartient à la bonne classe moyenne malgré le nombre record de sponsors régionaux et la nouvelle patinoire.

« Stoney » ne se cache cependant pas pour affirmer qu’on s’engage souvent à Bienne pour se relancer ou pour se développer. On peut difficilement le contredire. Mais de là à supputer que les joueurs qui quitteront le projet biennois en fin de saison le feront uniquement pour des raisons financières, il y a une marge.

Mais comme on le dit souvent dans ce genre de cas : « Dieu seul le sait, mais le diable s’en doute ».

Bon week-end !

Stéphane