Après le mondial M20 et la première phase de la CHL, la saison régulière de National League est à nos portes. Et plus que jamais, celle-ci est remplie de promesses en raison du nouveau format à 14 équipes et surtout du passage à 6 étrangers.
« Au jour d’aujourd’hui », tous les clubs affirment s’être améliorés. Aux vues du CV des éléments nouvellement débarqués, on veut bien les croire. Le souci, c’est que toutes les équipes semblent s’être étoffées, ce qui tend à annuler l’effet relatif des nouveaux transferts.
Parmi les « gros » étrangers, on retrouve notamment plusieurs gardiens. Un constat inhabituel puisque ces postes clés étaient pratiquement réservés aux Helvètes jusqu’à maintenant. Au point d’avoir fait des meilleurs portiers de National League comme Berra et Genoni de véritables multimillionnaires du hockey suisse.
C’est ainsi que Bienne, Kloten, Zurich, Ambrì et Lugano ont jeté leur dévolu sur des perles étrangères pour bloquer les tirs adverses. Une tendance prévisible qui risque de se généraliser lorsque les contrats des gardiens nationaux arriveront à échéance.
« Si les équipes alignant des gardiens étrangers connaissaient du succès, il ne serait pas étonnant de voir une dizaine de clubs aller dans ce sens d’ici quelques années » prédit un agent actif en Suisse.
Tout ceci au grand dam de la jeune génération. On imagine, par exemple, que Ludovic Waeber ne pourra jamais monnayer un retour à Fribourg comme Christoph Baertschy. Ou que Joren van Pottelberghe n’aura plus le même pouvoir de négociation dans le Seeland. Sans parler de la situation des Benjamin Conz, Niklas Schlegel ou Sandro Zurkirchen.
« Il faut faire baisser les salaires ». Voilà l’argument des clubs au moment de lancer l’idée saugrenue des dix étrangers. Avant de se raviser et voter le passage à six étrangers après le tollé de protestations. C’était, souvenez-vous, juste après le fameux questionnaire qui ressemblait plus à une étude de marché qu’à un sondage.
Si cette nouvelle législation a permis de réduire la dépendance aux gardiens locaux, elle n’aura sûrement pas contribué à réduire le niveau des salaires. Car les nouveaux mercenaires ne sont pas arrivés en chaloupe comme on l’avait supputé. « Le niveau des eaux est trop bas pour y naviguer cet été… » ironisait récemment un personnage du hockey suisse à ce sujet.
Pour les plus virulents supporters, tous ces changements n’étaient qu’un leurre depuis le début. Même si les théories du complot sont en vogue, les dirigeants étaient probablement de bonne foi. Parce que la réalité du marché a drastiquement changé en raison du conflit en Ukraine. Une situation que personne n’avait envisagée à la base.
Nos directeurs sportifs se sont ainsi retrouvés devant un marché inondé de joueurs de premier plan prêts à s’amener chez nous. Et comme des gamins devant un plat de bonbons, ils n’ont pas pu résister. Les étrangers numéro cinq et six, présentés à l’origine comme le restant de la colère de Dieu, s’avèreront finalement être des cadeaux du ciel.
Avec ces nouveaux importés « top nutch », le niveau de la ligue pourrait être très relevé. Peut-être même comparable à celui du début de la saison 2012-2013, l’année du dernier lock-out de NHL. À moins que la dilution qu’entraîne le passage à quatorze équipes dans un si petit pays ne vienne contrebalancer ces arrivées de luxe.
C’est surtout l’immense écart entre certaines équipes qui interpelle. Il y a d’abord ceux qui aspirent vraiment aux playoffs. Puis ensuite ceux dont le seul objectif est de ne pas basculer dans l’enfer de la relégation. Une réalité qui existe depuis belle lurette, mais qui pourrait être encore plus criante avec 14 équipes.
Et dire que dans un passé pas si lointain certains militaient pour une ligue à dix équipes. Avec du recul, force est d’admettre que cela nous donnerait un championnat drôlement équilibré. Une solution qui permettrait aussi de redonner du panache à une Swiss League aux abois. Mais tout ça n’est que de la théorie bien sûr.
Comme d’habitude, ce sont les plus fortunés qui ont tiré avantages du bouleversement du marché. C’est ainsi que Zurich, Zoug, Lugano semblent avoir « tanké » du très lourd. Idem pour Genève et Fribourg en Romandie. Cinq équipes qui devraient logiquement se retrouver dans le top six.
Le CP Berne pourrait peut-être accrocher la dernière place dans le top six, car il figure parmi les plus améliorés, même si les gardiens demeurent une interrogation. Certains prédisent d’ailleurs un portier étranger rapidement en cas de défaillance à ce poste. Quoi qu’il en soit, les Bernois seront de retour aux affaires après les années Covid. Chose promise, chose due pour Marc Lüthi.
Pour terminer à la cruelle onzième position, synonyme de fin de saison prématurée sans risque de relégation, Ambrì est la réponse la plus facile. Un club aux moyens financiers traditionnellement plus modestes. Mais avec sept bons étrangers déjà sous contrat, dont un gardien dominant et deux carrures en défense, les Léventins vendront chèrement leur peau.
Mais alors, qui rejoindra Kloten, Langnau et Ajoie dans le quatuor du bas classement ? Probablement la seule véritable inconnue de notre championnat, le reste n’étant qu’un long prélude aux séries éliminatoires qui débuteront en mars 2023.
À condition de ne pas s’éclairer à la chandelle cet hiver, évidemment.
Bonne saison,
Stéphane